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Rollin Verlinde

Argyronète

Même si elle ne possède pas de branchies, l'argyronète est comme un poisson dans l'eau. Elle fait tout depuis l'environnement sécurisé de sa cloche de plongée maison : manger, muer, hiberner, s'accoupler, pondre ses œufs...

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Reconnaître l'argyronète

(Argyroneta aquatica)

L'argyronète est un animal unique. Il s'agit de la seule araignée à passer toute sa vie sous l'eau. Il existe également des araignées marines, mais celles-ci n'appartiennent pas à la classe des arachnides et ne sont donc pas de vraies araignées. Vous avez repéré une araignée transportant une bulle d'air dans l'eau douce ? Vous avez alors affaire à une argyronète. Il est tout de même possible de se tromper, car il existe d'autres araignées qui vivent à proximité de l'eau. Certaines peuvent même marcher dessus ! L'argyronète peut être identifiée à l'aide d'autres caractéristiques :

  • elle mesure 8 à 15 mm de long
  • les mâles sont généralement plus grands que les femelles – inhabituel, pour des araignées
  • la paire de pattes antérieures du mâle est plus longue que celle de la femelle
  • elle est de couleur brune
  • son abdomen présente de longs poils fins qui donnent une teinte argentée à l'araignée quand elle transporte de l'air
  • ses deux paires de pattes postérieures sont couvertes de poils plus longs que ceux qui ornent les deux paires de pattes antérieures
  • elle vit dans une bulle d'air construite entre des plantes aquatiques 

Au menu

L'argyronète est généralement une chasseuse passive qui attend patiemment ses proies depuis le cocon formé par sa bulle d'air. Elle laisse pendre ses pattes dans l'eau afin que leurs poils captent les moindres vibrations. Notre araignée peut ainsi estimer quand elle doit attaquer et capturer sa proie. Il lui arrive aussi de chasser activement, mais elle se retire toujours dans son château d'air bien douillet pour manger.

Elle paralyse ses proies grâce à un poison redoutable – du moins pour les petits animaux. Ce venin dissout également les nutriments présents dans sa proie afin que l'araignée puisse sucer son repas. Le menu de cette petite araignée est surprenant, car elle ne recule pas devant des proies relativement grosses. Larves, têtards, tritons, crustacés, vers... Tout ce qui bouge et qui peut succomber à son venin est à son goût.

 

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Rollin Verlinde

Habitat

L'argyronète opte pour l'eau douce stagnante ou calme, mais n'est pas présente dans tout le pays. Elle suspend sa « cloche de plongée » – une toile en forme de boule – entre les plantes aquatiques. Pour transporter l'air vers sa cloche, elle utilise son propre corps. Elle soulève son abdomen hors de l'eau et quand elle l'immerge à nouveau, les poils de son abdomen et de ses pattes postérieures sont chargés d'air frais. Une fois revenue dans sa cabane, elle extrait l'air de ses poils à l'aide de ses pattes.

On pourrait penser que les argyronètes ont régulièrement besoin d'ajouter de l'air à leur construction pour avoir suffisamment d'oxygène, mais cette bulle est bien plus ingénieuse. Les araignées n'ont besoin de ramener de l'air qu'une seule fois par jour pour respirer, car leur bulle fonctionne comme une sorte de poumon ou de branchie : elle diffuse de l'oxygène au sein de la toile en direction de la cloche de plongée et  le dioxyde de carbone se répand immédiatement dans l'eau environnante. Moins l'araignée doit remonter à la surface pour respirer, moins elle est exposée aux dangers du monde extérieur.

Il arrive parfois à l'argyronète de remonter sur la terre ferme, mais ces sorties sont exceptionnelles. Quand sa mare est asséchée, elle doit rechercher un nouvel endroit pour ériger sa maison sous-marine. Certaines argyronètes quittent l'eau en hiver pour hiberner dans un endroit sûr mais humide. D'autres restent dans l'eau et transforment par exemple une coquille d'escargot en cloche de plongée d'hiver en la remplissant d'air et en la refermant à l'aide de fil.

L'argyronète et l'amour

Quand le mâle ressent le besoin de se reproduire, il part à la recherche d'une femelle. Il se dirige d'abord vers la cloche de plongée de Madame, mais la poursuit directement dans l'eau dans une sorte de danse nuptiale. Pendant la parade, il teste l'intérêt de sa belle. Si elle l'apprécie, elle l'invite dans sa bulle, où le mâle lui transmet son sperme. Il est ensuite chassé, comme c'est le cas chez les autres araignées. 

Maintenant que ses œufs sont fécondés, la femelle commence à construire une maternité – qui consiste en un étage supplémentaire au sein de sa bulle d'air. Elle produit une sorte de cocon qui contient 50 à 100 œufs et conserve l'ensemble au niveau supérieur de son refuge. Pendant 3 à 4 semaines, elle défend ses futurs petits et leur fournit régulièrement de l'air frais.

Quand les petites araignées sont formées, elles déchirent le cocon pour en sortir. Elles restent encore quelques semaines chez Maman, jusqu'à leur quatrième mue. À ce moment, elles sont prêtes à construire leur propre nid et à s'approvisionner seules en oxygène.

Relation avec l'homme

Comme l'argyronète a un style de vie unique, les amoureux de la nature la connaissent bien. On pourrait donc penser que cette petite araignée se retrouve partout, mais rien n'est moins vrai. Il s'agit d'une espèce assez rare dans notre pays et les observations sont limitées. Ses effectifs et la répartition exacte de ses populations tiennent de la devinette, car elle vit cachée.

Pendant longtemps, cette araignée a été un spécimen populaire en aquarium. Sa bulle d'air argentée et son style de vie si particulier en font un animal hors du commun. En Belgique, la capture des animaux rares et vulnérables est interdite – heureusement d'ailleurs. En tant que prédateur, l'argyronète joue un rôle prépondérant dans le cycle de la nature, car elle limite par exemple les populations de moustiques. 

Pour un animal si petit, le venin de l'argyronète est puissant ; elle l'utilise pour capturer ses plus grosses proies. Ce poison est inoffensif pour l'homme, mais une morsure peut tout de même être douloureuse ; elle est comparable à une piqûre de guêpe, mais se produit sous l'eau.

Saviez-vous que...

  • l'argyronète était la seule araignée à passer toute sa vie sous l'eau ?
  • les mâles étaient plus grands que les femelles ? Cette particularité est certainement due au fait que les femelles accueillent aussi leurs petits dans leur bulle d'air – et sont donc obligées de prendre moins de place.
  • l'argyronète avait développé différentes techniques de chasse ? Les mâles chassent activement, tandis que les femelles attendent patiemment leurs proies.