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Le loup est-il vraiment fidèle ?

L’info nature de l’année est sans conteste l’arrivée de la première meute de loups en Belgique depuis la fin du XIXe siècle. La meute, qui ne compte que deux mâles survivants parmi la première génération de louveteaux, est encore réduite. Dans les prochaines années, de nouveaux spécimens feront leur apparition et les jeunes adultes partiront pour fonder leur propre famille de leur côté. Seuls deux individus resteront toujours au même endroit : le couple parental August et Noëlla. Il existe pourtant des scénarios dans lesquels deux loups ne restent pas ensemble jusqu’à ce que la mort les sépare.

Certains chercheurs américains en sont arrivés à cette conclusion après avoir étudié pas moins de 44 meutes durant 25 ans dans le parc de Yellowstone. Comparer nos quelques loups dispersés à la population d’un immense parc national nord-américain peut sembler étrange, mais les deux situations ont plus de similitudes qu’il n’y paraît, car une sous-espèce de loup gris a également fait son retour dans le parc de Yellowstone après une longue période d’absence. Les scientifiques ont donc eu une chance unique de suivre de près la naissance d’une nouvelle population. Les circonstances comportent aussi des différences, car si August et Noëlla sont arrivés dans le Limbourg par leurs propres moyens, ce n’est pas le cas des meutes américaines.

L’art d’observer les loups

Les loups de Yellowstone sont originaires du Canada, où 41 d’entre eux ont été capturés et munis de colliers GPS. Ils ont été relâchés entre 1995 et 1997 pour être étudiés de près. Chaque année, les meutes nouvellement formées ont fait l’objet d’observations pendant 30 jours d’affilée pour répertorier les structures sociales qui les régissaient. Et les résultats de ces études pourraient totalement changer notre vision des loups !

Ne dites plus « loups alpha » mais « couple dirigeant »

De nombreuses personnes pensent encore que les meutes de loups sont soumises à une hiérarchie stricte avec un couple alpha à leur tête, qui impose le respect par son agressivité. Cette théorie des années 40 compte encore de nombreux partisans, mais les scientifiques ont entre-temps conclu que ce modèle était dépassé. La théorie de la dominance est en effet basée sur l’observation de loups en captivité à une époque où les programmes de réintroduction n’existaient pas encore et où les loups étaient capturés dans la nature.

La plupart du temps, il s’agissait de « loups solitaires » qui atterrissaient dans un zoo car il était plus facile de les voir durant leur migration. Imaginez : cinq jeunes mâles gorgés de testostérone, forcés de cohabiter dans une cage bien trop petite. Pas étonnant que la tension soit palpable et l’agressivité bien présente !

La situation décrite ci-dessus n’est absolument pas comparable au mode de vie des loups en pleine nature, qui partagent des liens familiaux et préfèrent éviter le conflit. C’est aussi ce qu’ont constaté les chercheurs dans le parc de Yellowstone : les meutes sont formées de vraies familles dans lesquelles le père et la mère jouent un rôle prépondérant du fait de leur statut de « parents » et non parce qu’ils se sont hissés aux positions d’autorité.

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A quel moment un autre loup devient-il le meneur ?

Sur toute la durée de l’étude, les scientifiques ont observé au total 152 couples de loups. Dans les trois quarts des cas, leur statut de « dominants » a pris fin à la mort de l’un des parents. Cette situation s’est aussi produite dans le Limbourg en 2019, lorsque Naya, la première femelle d’August, a disparu sans laisser de traces.

Il arrive aussi que l’un des parents occupe un rôle moindre dans la structure familiale, par exemple suite à une maladie ou un accident. Le loup « déchu » ne s’occupe alors plus de la reproduction et cède sa place à un nouveau meneur qui vient s’installer au sein de la meute. L’ancien leader affaibli continue à faire partie de la famille.

Et en cas de « divorce » ?

Pour 9 % des couples étudiés, le conte de fée s’est soldé par une séparation de corps. Les parents se quittent et l’un d’eux doit s’en aller. C’est généralement le mâle qui part car la femelle jouit d’une plus grande considération de la part de ses pairs. Le monde des loups est en effet une société matrilinéaire, où les territoires passent de mère en fille ou de sœur en sœur. Lors d’une séparation, la femelle et ses petits vont former une « alliance » avec un nouveau mâle qui perpétuera la lignée. Le mâle répudié doit par contre tout recommencer à zéro.

La raison qui pousse un couple de loups stable à se séparer n’est pas évidente. Dans l’un des cas, la femelle a accueilli un groupe de mâles dans sa meute pour augmenter les chances de survie de sa famille. Elle a séduit l’individu le plus fort et son ex-compagnon a dû quitter le groupe. En s’entourant de plusieurs mâles, la femelle s’est assurée que sa famille attrape des proies plus grosses et qu’elle s’en sorte mieux en cas de lutte avec une autre meute.

Généralement, les liens familiaux entre les loups sont très forts et un étranger ne parvient pas facilement à s’immiscer. Pourtant, même si cela peut sembler dur, la meute en arrive parfois à ce stade car une loi primordiale de la nature l’emporte : la survie du plus fort.

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