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Gert Vandezande

Où peut-on observer la migration des grues cendrées ?

Le mois d'octobre vient à peine de commencer, et les grues cendrées sont à nouveau au centre de l'action. Chaque automne, souvent à partir de la fin octobre, ces oiseaux bruyants survolent en masse l'est de la Belgique – un spectacle qui se trouve au sommet de la bucketlist de nombreux amoureux des oiseaux. Pour être sûr.e de ne pas les manquer, David Kever et Gert Vandezande ont créé l'European Crane Migration Network (ECMN). Ils collaborent ainsi avec d'autres passionnés des grues cendrées d'Europe de l'Ouest et cartographient le grand voyage de plusieurs centaines de milliers de ces oiseaux en temps réel.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que Gert est sur des charbons ardents. Pour se préparer à la grande migration des grues cendrées qui débutera sous peu, il ne compte plus ses heures supplémentaires. Il travaille assidûment pendant la journée afin d'avoir suffisamment d'avance pour se consacrer entièrement à sa passion, certes chronophage: le suivi des grues cendrées. Il s'informe également sur la situation en Europe du Nord en rassemblant les informations fournies par ses collègues observateurs et en les transformant en prévisions : nombre, timing et routes empruntées par ses chères grues.

D'une importance primordiale

Plus de 4 000 personnes suivent la population des grues cendrées d'Europe via la page Facebook de l'ECMN, mais il existe bien davantage d'intéressés, explique Gert : « Nous sommes en contact direct avec le Bird Control Unit de l'armée belge. Ils utilisent nos données comme informations complémentaires pour déterminer quand ils doivent laisser leurs F16 au sol. Les grues cendrées sont de grands animaux avec une envergure de 220 cm. Mieux vaut ne pas les croiser pendant un exercice au-dessus de l'Ardenne, car la rencontre pourrait être fatale – et pas uniquement pour la grue. »

Les producteurs d'électricité suivent aussi la migration. « Certains grands parcs éoliens à la frontière française sont mis à l'arrêt pendant plusieurs heures quand de nombreuses grues cendrées sont attendues. Grâce à l'étendue de notre réseau, nous savons précisément quand les oiseaux passeront à un endroit crucial pour leur migration. Nous pouvons ainsi éviter les accidents avec cette espèce protégée et limiter la perte de rendement pour les producteurs d'énergie. »

« Il y a également des équipes de tournage qui se basent sur notre expertise pour filmer la migration », ajoute Gert avec un clin d'œil. Vous pouvez par exemple admirer le résultat en vidéo ici.

Pourquoi les grues cendrées ?

Gert pourrait être qualifié de « primo adoptant » : il observait les oiseaux longtemps avant que ce hobby soit à la mode. « En réalité, j'ai commencé à l'école primaire ; je m'intéressais déjà à tout ce qui volait. Comme c'est souvent le cas, je me suis un peu détourné de cette passion pendant mes études, mais le feu ne s'est pas éteint pour autant. Quelques années plus tard, j'ai repris du service et me voici à nouveau. »

« Je trouve les grues cendrées particulièrement intéressantes parce qu'elles marquent le début du printemps. Quand elles survolent notre pays en début de saison, je sais que tout va aller mieux. Elles font énormément de bruit en communiquant sans cesse avec leurs congénères sur la route à suivre, mais pour moi, leurs cris représentent le réveil de la nature. Le seul problème, c'est qu'il est difficile pour une personne employée à temps plein d'être au bon endroit au bon moment. Il y a dix ans, j'ai rencontré David Kever au Signal de Botrange pendant une migration, et il partageait ma frustration. Nous nous sommes tout de suite bien entendus et nous avons créé l'ECMN ensemble comme exutoire. »

Des zones d'ombre

Depuis lors, Gert s'est créé une liste de contacts sur tout le trajet emprunté par les grues. « En Belgique, ça a été très rapide, mais cela a été plus compliqué pour cartographier le trajet au-dessus des autres pays. Nous ne pouvons perfectionner nos prévisions qu'en agrandissant notre réseau. Notre carte comporte encore des zones d'ombre, mais nous tentons d'échanger nos données avec les associations ornithologiques locales : leur travail s'en trouverait également amélioré, et nous pourrions encore mieux comprendre le comportement migratoire de ces superbes oiseaux. »

La migration des grues d'Europe occidentale

Au début de la migration automnale, de nombreuses grues cendrées se posent sur les bords du lac Hornborgasjön, explique Gert. « Il s'agit du rassemblement le plus important d'oiseaux migrateurs en Suède. C'est le point de départ de leur voyage vers le sud; la plupart atteindront le nord de l'Allemagne fin septembre. Des observateurs ont compté plus de 44 000 grues au début de cette semaine sur l'île allemande de Rügen ! Une partie traverse les tourbières de Diepholz et passera ensuite en Belgique. Nous surveillons donc de près l'activité de ce groupe afin de prévoir leur passage chez nous. Nous attendons trois grandes vagues comptant plusieurs milliers de grues, peut-être même plusieurs dizaines de milliers, pour la dernière semaine d'octobre ou la première semaine de novembre. »

« Leur lieu de repos suivant se trouve sur les bords du Lac du Der en Champagne-Ardenne. Il s'agit de l'endroit le plus proche de notre frontière pour voir de grands groupes de grues cendrées s'arrêter (268 000 en 2019). C'est à cet endroit que les deux routes migratoires occidentales se rassemblent. Plusieurs dizaines de milliers de grues cendrées tentent même d'y passer l'hiver, mais le reste d'entre elles repart vers le sud. La majorité des oiseaux s'abritera en Extremadura, en Espagne, où l'on compte 25 000 grues cendrées pendant la mauvaise saison. »

Aussi importantes que le loup

Si l'on avait dit à Gert il y a dix ans que des grues cendrées nicheraient à nouveau dans notre pays en 2021, il n'y aurait jamais cru. « Et pourtant, ça y est ! L'année passée, un couple avait déjà été repéré dans la vallée du Zwarte Beek, au Limbourg, et cette année, ils ont accueilli deux petits : Gru et Dru. Ces naissances sont une superbe récompense pour le travail acharné accompli par les associations nature durant la dernière décennie. De nombreuses personnes ne s'en rendent pas compte, mais pour les ornithologues, le retour de la grue cendrée est aussi merveilleux que celui du loup. Il signifie que notre biodiversité est de plus en plus riche. »

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Gert Vandezande

Où voir des grues cendrées ?

Cet article vous a inspiré.e ? Vous souhaitez sauter dans votre voiture et aller admirer les grues ? La page Facebook de Gert donne toutes les informations utiles sur les grues cendrées. « Je la mets à jour tous les dimanches matins à 7h, et ce pendant toute l'année. Pendant cette saison, je partage surtout le nombre de grues qui ont été repérées au nord, mais je donne aussi des informations intéressantes le reste de l'année : cela peut parfois être des études scientifiques, mais aussi des anecdotes sur la vie quotidienne d'une famille de grues cendrées. »

À partir de la mi-octobre, Gert met les bouchées doubles : « Dès que nous savons que les grues cendrées vont passer au-dessus de la Belgique, je mets la page à jour chaque matin. Quand elles sont toutes proches, je donne des infos en temps réel. Et mon téléphone n'arrête pas de sonner, car c'est vraiment le moment le plus important pour les passionnées de grues cendrées. Si vous souhaitez assister au spectacle, je vous conseille de rechercher un endroit ouvert, où vous pourrez voir l'horizon du nord-ouest à l'est. En automne, le meilleur poste se trouve à l'est de la ligne qui relie Eupen à Saint-Vith. Si vous pouvez vous y rendre, vous verrez les oiseaux arriver. Il ne vous restera qu'une chose à faire : profiter ! »

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Gert Vandezande

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