Petit mais costaud : le marsouin, notre baleine miniature
Vous pouvez observer le marsouin commun nager près de nos côtes pratiquement toute l'année, même si vous aurez besoin d'une vue d'aigle pour le repérer. Seule sa nageoire dorsale triangulaire qui dépasse au-dessus de la surface vous permettra de le reconnaître. Le plus petit cétacé d'Europe avait pratiquement disparu de la mer du Nord dans les années 1960, mais fait son grand retour depuis une vingtaine d'années. Si vous avez de la chance, vous pourrez même le croiser sur l'Escaut quand il se lance à la poursuite d'un banc d'éperlans.
Un défi pour les amateurs de cétacés
Avec sa taille moyenne (entre 1m50 et deux mètres de long), le marsouin commun est beaucoup plus discret que les autres cétacés qui occupent les océans. Son poids d'environ 75 kg lui confère la stature d'un homo sapiens de taille moyenne. Il présente un dos gris et un ventre presque blanc. Il était autrefois assimilé aux poissons à cause d'un manque de vocabulaire, comme beaucoup d'espèces qui vivaient dans la mer.
Pour les amateurs de baleines, la côte belge n'est pas exactement l'Eldorado : le marsouin commun est de fait le seul cétacé qui y expose sa nageoire dorsale triangulaire. Les espèces plus grandes rencontrent rapidement des difficultés dans nos eaux peu profondes. Il vous faudra en outre un peu de chance pour apercevoir un marsouin au-dessus de la surface. N'attendez pas de lui qu'il imite les sauts et saltos du dauphin au profil plus aérodynamique et aux airs quelque peu vantards. Vous ne rencontrerez le marsouin à la surface que lorsqu'il reprend son souffle avant de replonger sous l'eau pour de longues minutes. Le marsouin est en plus un mammifère solitaire ; vous ne le verrez donc que rarement en compagnie de plus de cinq congénères, ce qui le rend d'autant plus difficile à localiser. Cependant, le marsouin commun est le mammifère marin le plus courant en Belgique – il est tout simplement moins visible que les phoques.
Quand et où le voir ?
Le marsouin commun est un animal très mobile qui peut aussi bien vivre dans les eaux salées qu'en eau douce ou en eau saumâtre. Il peut ainsi facilement migrer vers d'autres régions si la nourriture vient à manquer, par exemple à cause de la surpêche. Ce problème se pose de plus en plus fréquemment dans sa région d'origine, les régions septentrionales de la mer du Nord, non loin de l'Écosse. De nombreux marsouins viennent donc du nord et rejoignent nos côtes dans l'espoir d'une vie meilleure – ou d'un buffet sous-marin plus riche.
Au printemps, il arrive qu'un marsouin ou l'autre remonte l'Escaut oriental ou occidental. Ce n'est pas si surprenant, car ce cétacé apprécie les eaux peu profondes aux températures basses (en-dessous de +17 °C). Pour pouvoir supporter le froid, il doit préserver sa couche de graisse. Et comme son menu se compose de petits poissons comme le hareng, le cabillaud et le sprat, de poissons plats comme la sole, la limande et le turbot ou encore de petits calamars, de crabes et de crevettes, le marsouin doit chasser sans cesse. Heureusement, cette activité ne lui demande pas trop d'énergie. Le marsouin commun est un cétacé à dents qui présente de longues rangées de dents en forme de spatules. Il se sert de ses mâchoires pour « brouter » les fonds marins et avale sans peine sa portion quotidienne de cinq kilos de poissons. Il se sert également de l'écholocation pour repérer ses proies.
En principe, les marsouins nagent le long des côtes belges toute l'année, mais vous aurez plus de chances de les voir depuis un bateau en hiver et au printemps. Les marsouins sont généralement aperçus en grands nombres en mars et en avril, mais désertent nos côtes en automne. N'espérez pas les voir lors des jours venteux : il vous sera difficile de distinguer leur nageoire dorsale si typique dans les vagues de 20 à 30 cm de haut. Mieux vaut partir en quête de marsouins lors des journées ensoleillées et calmes.
Vous devrez en revanche attendre le mois de juillet pour voir les bébés. Les marsouins s'accouplent entre juin et début août ; s'en suit une gestation d'environ onze mois. Cela signifie donc que le bébé ne verra le jour qu'au cours de l'été suivant. Les femelles fécondées qui traversent les eaux au printemps sont donc déjà loin dans leur gestation.
De « quasiment éteint » à « menacé et protégé »
Si les choses avaient continué au même rythme, cet article aurait pu être notre discours d'adieu au marsouin commun. Dans les années 1960, ce petit cétacé avait pratiquement été exterminé en mer du Nord à cause des produits toxiques industriels qui étaient encore déversés impunément dans nos cours d'eau. Ces déchets se retrouvaient ensuite dans la mer du Nord et entrainaient des conséquences catastrophiques pour le marsouin – ainsi que pour le hareng, son plat préféré. Heureusement, l'espèce a refait son apparition plus tard, bien décidée à nous offrir un retour mémorable. Et ce retour est réussi, car selon les estimations, 5000 à 10 000 marsouins communs peuplent aujourd'hui les eaux belges.
Malheureusement, le marsouin commun souffre toujours de la présence de l'homme dans son habitat. Les pêcheurs qui attrapent sa proie favorite réduisent ses chances de trouver de la nourriture en suffisance, et il arrive que notre cétacé meure de faim. Parfois, les marsouins sont pris dans les filets des bateaux de pêche et se noient en tentant de s'échapper. Ils ne sont en effet capables de rester sous l'eau que quelques minutes avant de devoir rejoindre la surface pour respirer. Comme ils sont particulièrement vulnérables, les marsouins se trouvent sur la liste des espèces protégées. La pêche aux marsouins est par conséquent interdite – du moins pour l'homme, car certains animaux le chassent. En 2020, 65 marsouins communs se sont échoués sur les plages belges, un taux relativement faible si on le compare aux chiffres des années précédentes : entre 50 et 150 marsouins s'échouaient alors en moyenne sur nos plages. La majorité de ces animaux étaient morts suite aux attaques de phoques gris.
Vous avez trouvé un marsouin échoué sur la plage ?
Restez à distance et contactez l'IRSNB ou les urgences. Tenter de remettre à l'eau un marsouin échoué est non seulement stressant pour l'animal, mais surtout risqué, car il pourrait être à nouveau attaqué par le même prédateur. Les signalements permettent en outre aux chercheurs d'étudier en détail la répartition de l'espèce.