Aller au contenu principale
vilda-95153-gewone-pad-bert-willaert-1900-px-58640.jpg
Bert Willaert

Le grand voyage de M. Crapaud et Mme Grenouille

Chaque printemps, nos amphibiens accomplissent un long trajet parsemé de dangers. Ils rejoignent en effet les eaux dans lesquelles ils sont venus au monde pour donner naissance à leur tour à de minuscules œufs par milliers. Mais pourquoi agissent-ils de la sorte ?

Ça y est, le printemps n’est plus très loin ! Pour les amphibiens, cela signifie que l’hibernation est terminée et qu’il est temps de sortir de leur longue torpeur pour se lancer à la recherche d’un.e partenaire. Ils quittent alors leurs quartiers d’hibernation et se lancent dans un long voyage pour rejoindre leur lieu de naissance. Mais pas question de sortir n’importe quand ! Les amphibiens préfèrent se déplacer quand les conditions sont idéales : de nuit ou par temps couvert, quand il fait humide et surtout quand les températures ne sont ni trop froides, ni trop chaudes (plus de 7 °C). C’est seulement à ce moment que les crapauds, grenouilles, salamandres et tritons partirons dans leur grande aventure.

Retour aux sources

Si certaines espèces comme l’alyte accoucheur ne se déplacent que très peu et préfèrent rester toute l’année dans la même zone, d’autres telles que le crapaud commun peuvent parcourir jusqu’à 4 ou 5 km pour retrouver la mare de leur enfance. Mais comment trouvent-ils leur chemin année après année ? Il est probable que nos amphibiens utilisent plusieurs méthodes différentes pour s’orienter.

Certaines recherches menées sur le triton crêté indiquent par exemple que celui-ci utilise principalement son odorat pour retourner à sa mare de naissance et se montre incapable de retrouver son chemin s’il est déplacé trop loin de son trajet habituel. D’autres espèces pourraient en revanche utiliser les champs magnétiques terrestres pour se repérer. De plus, les coassements des anoures sont un autre indicateur qui aide les amphibiens à retrouver leur route. Mâles et femelles n’utilisent d’ailleurs pas toujours la même technique. Les crapauds calamites mâles, par exemple, emploient leur vue ; une fois sur place, ils appellent les femelles, qui peuvent à leur tour s’orienter en suivant le chant de ces messieurs.

Crapaud calamite qui coasse pour appeler les femelles
Yves Adams
Crapaud calamite qui coasse pour appeler les femelles

Un voyage parsemé de dangers

Aucune aventure ne serait qualifiée comme telle si elle ne comportait pas son lot de dangers. Les changements climatiques et la destruction de leurs habitats (urbanisation, drainage des zones humides) ne facilite déjà pas les choses, sans compter les risques de pollution de l’eau. Comme nos grenouilles respirent en partie par la peau, imaginez le carnage ! Cependant, la préoccupation principale pendant la migration reste la circulation routière. En Belgique, les animaux risquent de tomber sur une route tous les 200 mètres. Les amphibiens sont malheureusement très nombreux à ne pas survivre au trajet ; s’ils ne sont pas directement écrasés par les véhicules, ils risquent d’être aspirés et de tout de même finir sous les roues ou d’être projetés contre les soubassements des voitures. Ces catastrophes sont les raisons pour lesquelles des panneaux (et/ou des dispositifs ralentisseurs) sont régulièrement placés le long des routes, rappelant aux automobilistes de ne pas dépasser 30 km/h sur les tronçons traversés par les amphibiens. Dans certaines communes, des pans entiers de routes sont même fermés à la circulation pour éviter que les amphibiens ne se retrouvent piégés.

Comme la prévention ne suffit pas toujours, il faut parfois rivaliser d’ingéniosité pour aider nos amphibiens à traverser nos routes. Les crapauducs et écotunnels aident par exemple les crapauds et grenouilles à se déplacer en toute sécurité. Lors de la migration printanière, des équipes de bénévoles emmenées par Natagora en Wallonie et par Natuurpunt en Flandre se mobilisent pour récupérer les amphibiens dans des seaux installés de part et d’autre de la route avant de les déplacer de l’autre côté. Parfois, des barrières sont posées des deux côtés de la route afin d’orienter les grenouilles vers lesdits seaux. Les volontaires peuvent ensuite encoder les résultats de leurs sauvetages sur Observations.be afin d’aider les organismes de protection de la nature à évaluer les populations de salamandres, tritons, grenouilles ou crapauds.

Malheureusement, les automobilistes ne sont pas les seuls dangers sur les routes : bordures trop élevées pour permettre aux animaux de les enjamber, caniveaux humides qui les attirent et les empêchent d’atteindre leur destination finale avant la ponte, stations d’épuration qui longent le chemin et dont les parois sont trop hautes ou encore chemins de fer sont d’autres risques qui attendent Monsieur Crapaud et Madame Grenouille dans leur périple le long de nos infrastructures.

Plusieurs migrations par an

Si ce voyage vous semble déjà exténuant, il n’est pourtant pas le seul accompli par nos amphibiens ! La migration dite « prénuptiale » est la plus impressionnante, car elle s’effectue sur un laps de temps assez court : tous les amphibiens se déplacent plus ou moins à la même période. Ils rejoignent leurs sites de reproduction en début d’année (dès le mois de février), mais une fois leur « petite affaire » réglée, nos amis quittent la mare sans demander leur reste et partent vers leurs quartiers estivaux. Ce voyage est plus espacé dans le temps, car certaines espèces restent à proximité de l’eau plus longtemps que d’autres. Les jeunes têtards, quant à eux, doivent encore sortir de leur coquille, grandir et se métamorphoser avant de prendre la route dans leur nouvelle peau d’adulte. Et une fois la belle saison terminée, certains de nos amphibiens (par exemple la grenouille rousse) repartent vers une nouvelle destination pour pouvoir hiberner bien à l’abri. La vie est fatigante quand on est une grenouille (ou un crapaud) !

Têtards de grenouilles rousses
Rollin Verlinde
Têtards de grenouilles rousses
SOS batraciens

SOS batraciens

Les routes ne sont pas sûres pour nos amis à la recherche d’un.e partenaire. La circulation routière est l’une de leurs principales causes de mortalité pendant leur voyage. Mais heureusement, nous pouvons les aider : il suffit de participer à un sauvetage ! Comment ? En rejoignant l’une des équipes déjà mises en place ou en créant la vôtre. Ne laissez plus nos grenouilles et crapauds périr au cours de leur quête et soyez leur ami.e pour la vie.

JE SAUVE LES BATRACIENS

En savoir plus


Articles liés